Comment définir le pire voyage ?
Pour moi, ce fut le Vietnam. Pourtant, les paysages, les monuments et les transports étaient à la hauteur de nos attentes. Comment se fait-il que nous n’en ayons gardé aucun souvenir positif ? Oh, la beauté de la baie d’Halong ! Pour découvrir la beauté du Vietnam, il nous a fallu regarder les photos prises sur place à notre retour en France. Pourquoi certaines personnes adorent-elles certains lieux que d’autres abhorrent ? D’ailleurs, quels sont les éléments qui développent le vécu de « pire voyage » ?
Difficile d’être objectif : une histoire d’amour vécue dans un pays quelconque enjolivera les souvenirs. Se faire dépouiller de tous ses biens n’incite pas à apprécier le lieu de villégiature. Faire un trek d’un mois en juillet dans les montagnes thaïlandaises et revenir avec des mycoses purulentes ne poussent pas à recommander ce pays-là. Parlera-t-on de « pire voyage » de sa vie ?
L’Inde, on l’aime ou on la quitte, lit-on souvent. Voir des enfants fouiller dans une décharge pour subsister sera supportable pour certains qui auront la capacité de raisonner (la politique locale est corrompue, ils sont trop nombreux, autant la décharge sinon ils mourraient…). Pour d’autres, l’empathie ou la projection sera présente et rendra impossible la poursuite du voyage dans ce lieu. La sensation d’être un porte-monnaie sur pattes peut être compris intellectuellement mais très mal vécue.
Etre une femme et par ce simple fait se trouver exposée aux « frottements », aux insultes, au mépris n’incite pas à l’indulgence. Lisez Clo&Clem et réfléchissez. On parle beaucoup de harcèlement dans les rues des villes françaises. Comment qualifier alors ce qui est vécu ailleurs? Combien de pays considèrent le viol comme un crime passible d’une peine de prison et non comme la réponse d’un Mâle à la « provocation » d’une femelle ?
Madame, pourquoi vous couriez ?
– Je suis très en retard ! Je courais pour avoir mon bus.
– Oui… Mais… Quand vous courez, votre derrière fait des mouvements… Comment dire… Impudiques !
– EH BIEN VOUS N’AVEZ QU’A PAS REGARDER MON CUL !Marjane Satrapi. Persepolis tome 4
Souvent, il suffit de discuter avec les locaux, de parler vraiment, en prenant son temps, en oubliant les stéréotypes pour se convaincre de la vie facile et confortable que nous menons en France. Comment ne pas être choqué d’apprendre que les vietnamiens cumulent deux à trois boulots pour survivre, d’apprendre les exactions commises par les Français du temps des colonies, des Américains lors de la guerre et des communistes ensuite ? Comment croiser sans honte les yeux d’un enfant poly-handicapé grâce à l’agent orange, omniprésent pour encore des décennies dans le sol vietnamien ? Que dire du regard des adolescents se vivant comme sans avenir ? Qui se souviendrait encore de la phrase dite avec calme et résignation par un jeune cubain de 20 ans en montrant un clochard couché sur un trottoir ? « Dans 20 ans, je serais à sa place et je mourrai » ?
Comment ne pas penser que notre lieu de naissance nous a favorisé sans aucun mérite de notre part ? Plus facile de « réussir » sa vie quand on naît dans une famille aisée de Stockholm que dans une favela de Rio de Janeiro, non ? Relisez l’exploit réalisé par amour par ce jeune indien et imaginez-vous vivre dans les mêmes conditions que lui.
Tout dépend en fait de votre implication émotionnelle : votre but réside dans la découverte de cultures différentes, de monuments fabuleux et vous reléguez loin derrière les rencontres humaines et les discussions avec les locaux ? Vous avez la capacité de « rester à distance » et d’apprécier ce que vous voyez mais surtout de ne pas voir ce qui pourrait heurter votre sensibilité ou de le relativiser.
Monsieur Senior ajoute : Apparemment chacun a son niveau d’implication émotionnel ! Que dire du bon citoyen français écologiste d’occasion qui fait l’effort de rouler en voiture électrique et condamne par la même occasion au moins les espèces dites développées comme les mammifères aux conséquences des déchets radioactifs dont l’élimination se compte non pas en dizaines d’années – petite joueuse – mais en centaines d’années, si ce n’est en millénaires ! Il est vrai que ça évite les problèmes de l’instant – durée de projection dix ans à tout casser – des pollutions des énergies dites fossiles. Les sentiments auraient-ils des longueurs différentes tout comme les nez ce qui permettrait de voir plus ou moins loin ? Trêve de plaisanteries avec les émotions et autres sentiments.
Il y a des pires voyages qui se définissent beaucoup plus simplement. Pour un grand nombre il s’agit directement de : « la chose promise ou mieux imaginée n’est pas au rendez vous ! «
Voyager nous confronte à nos limites. Les miennes résident dans l’exploitation humaine, les droits des femmes et des enfants. Que de pays me sont inaccessibles par ces simples mots !
Et vous, quelles sont vos limites ?
Quels pays vous tentent et lesquels vous révulsent ?
Etre un Voyageur nécessite-t-il de s’endurcir le cœur ?
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Nous sommes tous des abrutis de touristes
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9 commentaires
Très bel article ! Ça m’a beaucoup touchée. Personnelement j’ai toujours bien vecu mes voyages, j’ai quelques petites annecdotes désagreables mais je me concentre toujours sur le positif. Quand je lis des articles negatifs sur le vietnam, je ne reconnais pas mon exprience de ce beau pays. Je ne suis jamais allée en Inde.
je suis d’accord avec vous, il est essentiel de se concentrer sur le positif. Et vive les voyages
Finalement de mes quelques 60 pays ou régions visités depuis 1967, je n’ai pas eu d’enquiquinements marquants (comme dit le Guide du Routard). Sauf peut-être en Afrique du Sud pendant l’apartheid ! Je pensais y rester 3 semaines et à mon arrivée c’était le début de « état d’urgence » comme les blancs disaient. Trouver un hôtel avec mon accent typiquement français cela a été un enfer. Au check-in c’était OK pour une chambre de 4 jours mais au 2ème jour réveille à 6h du matin par la réception (tenue par des blancs) pour savoir si je reste pour la nuit prochaine. J’ai répondu oui. Grand malheur ! pas de service effectué dans ma chambre, pas de lit fait, serviettes humides laissées en plan, etc…Le lendemain, dans l’ascenseur pour prendre le PDJ le manager m’a demandé de quitter l’hôtel.!
Autre enquiquinement, je pensais louer une voiture, et chaque on me répondait « it’s full » ???
J’en concluais que les français sont les « malvenues » vu le contexte !!
J’ai donc écourté mon séjour à une semaine après de laborieuses négociations sur le vol vers La Réunion…
Le seul point que j’en garde ce sont les quelques contacts avec les Noirs dès qu’ils décelaient mon accent de français, comme une carte d’identité qui vous ouvrent les portes ou les ferment…
De nos jours, l’ambiance Sud africaine est tout autre d’après les médias.
Je continue à voyager selon mes états d’âmes et surtout sans préjugés ou clichés des autres. C’est peut-être pour cela que je trouve notre caverne Terre toutefois belle, bien que ses copropriétaires me semblent bien peu humains, comme on le souhaiterait dans nos vues occidentales !
Bon courage aux voyageurs moins jeunes…
Merci pour ce partage. je ne suis pas encore allée en Afrique du Sud…
Que s’était-il passé ?
Un trajet en avion Bordeaux -Marseille. Comme quoi
s’endurcir le coeur ? non juste être conscient ou prendre conscience du monde dans lequel nous vivons, de la différence d’être en france ou de vivre ailleurs…cela éviterait peut-etre à des gens d’etre si terrorisés quand un charlie hebdo arrive. il parait que les gens des métiers de la santé apprennent non pas à s’endurcir car sinon ils ne peuvent plus bien faire leur job mais à relativiser, c’est sans doute pareil pour quelqu’un qui voyage et qui prend conscience alors du monde tel qu’il est, si beau mais si dur. Et par là même à apprécier son bonheur et sa chance de vivre surtout à notre place.
Ayant travaillé dans le domaine de la santé, c’est sur la notion de « distance » que l’on travaille. C’était ma faiblesse et c’est toujours le cas quand je voyage. 🙁
Yes merci la notion de distance, il faut en prendre mais pourtant être proche de son patient (beau numéro d’équilibriste ;-)) à mon avis, non ?
Donc cela dépend de base de la sensibilité, empathie de chacun et sa capacité à prendre de la distance. Pour ma part, l’empathie est en concurrence forte avec une logique assez forte, je me dis maintenant : dans tous les pays, il y a des très riches, ce sont à eux en 1er d’aider « leurs » pauvres au lieu d’en profiter. Cela ne m’empêche pas de filer à bouffer à un pauvre gamin des rues mais je résiste à tous ceux qui demandent une pièce sans même dire bonjour (la désagréable sensation d’être un porte monnaie sur pattes parce qu’on est blanc tandis qu’un autochtone passe à côté dans un 4×4 rutilant que je pourrais à peine me payer en y mettant toutes mes économies / donner une pièce pour arrêter de culpabiliser). Je ne les sauverais pas en leur donnant à chacun une pièce mais peut-etre que dans mes choix de vie en france, je pourrais plus influencer leur destin (pas tout seul forcément).